Promouvoir les meilleures pratiques des sociétés cotées

Informer

La veille de l'Hebdo des AG

L’édito de Bénédicte Hautefort

Innovation digitale, intransigeance des actionnaires au moment du vote

L’assemblée d’Orange est un concentré de ce que le digital peut apporter à une assemblée d’actionnaires. Un écran unique avec trois vues simultanées, l’orateur, les slides, et la transcription du discours, un rythme enlevé, une camera qui suit le PDG Stéphane Richard qui se déplace de salle en salle, tel un film qui embarque l’actionnaire internaute, une séance de Q&A avec pas moins de 6 responsables opérationnels en visioconférence. Orange a réinventé l’ « événement AG ». On regrette que le groupe ne soit pas allé jusqu’au bout du digital, avec le vote en direct. L’année prochaine ? L’assemblée d’Orange a aussi été emblématique de l’intransigeance des actionnaires au moment du vote. Six autorisations financières ont été rejetées, parce qu’elles étaient activables en cas d’OPA. Les actionnaires avaient averti plusieurs années de suite qu’ils n’en voulaient pas. Mais ils sont prêts à approuver les mêmes résolutions, désactivées en cas d’OPA, ce qu’ils ont fait. 

Orange sort de cette assemblée avec toutes les marges de manœuvre financière possibles. Intransigeants aussi, les actionnaires, chez Voltalia, où ils ont rejeté la convention réglementée qui lie la société à son actionnaire de référence, la famille Mulliez ; Voltalia est la troisième société confrontée à cette difficulté cette année, après Sartorius et Catana. Les actionnaires réclament plus de transparence sur ces accords familiaux. Parfois, les actionnaires anonymes dits « du flottant » n’arrivent pas à peser assez lourd dans la balance. Ils n’ont pas réussi, à l’assemblée de Carrefour, à faire rejeter la rémunération du PDG Alexandre Bompard, passée avec 63% d’approbation ; ni le renouvellement du mandat de Philippe Houzé, représentant d’un des actionnaires de référence, les Galeries Lafayette, passé à 70%. L’Etat français, qui était intervenu en janvier pour protéger Carrefour de son assaillant, le groupe canadien Couche-tard, cette fois n’a pas commenté. Bercy n’a pas commenté non plus la forte hostilité des actionnaires au « package » de l’ex-DG d’EngieIsabelle Kocher , partie avec 3,3 millions d’euros. Au vu du résultat des votes, l’Etat a forcément voté pour.

 Ces soutiens et ces silences de l’Etat-actionnaire sont des événements, à portée plus large encore qu’un clivage entre actionnaires du flottant et actionnaires de référence. Après l’approbation de la rémunération de Patrice Caine à Thalès, le vote de l’Etat français à Engie confirme qu’il n’est plus systématiquement contre les rémunérations dites « trop élevées », ie supérieures à 450 000 euros, et les avantages tels que retraite-chapeau ou parachute doré. C’est la fin de neuf ans d’application élargie du décret de 2012, officiellement concernant seulement les entreprises publiques, officieusement la référence pour tous les votes de l’Etat actionnaire sur ses participations. Thalès et Engie sont-ils des cas isolés ou un début de campagne présidentielle ? L’assemblée de Safran demain 26 mai sera un nouveau test. 

Numéro en cours

Numéro précédents