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La veille de l'Hebdo des AG

L’edito de Bénédicte Hautefort

Cette semaine, les députés ont reconduit l’état d’urgence sanitaire jusqu’au printemps 2021. Pour les entreprises, cela signifie très probablement une nouvelle saison d’assemblées comparables à celles du printemps 2020 : « à huis clos », avec les avantages et les inconvénients du dispositif – qu’il est encore temps d’améliorer ; et focalisées sur quatre sujets : la rémunération des dirigeants, les dividendes des actionnaires, le financement des entreprises, et enfin la gouvernance, parfois contestée ces derniers mois.

Sur tous ces sujets, le petit village gaulois fait comme d’habitude : pas comme les autres.

Sur les dividendes : là où, en moyenne dans le monde, 22% des entreprises cotées ont réduit ou coupé leurs dividendes , la proportion a été de plus de 70% en France. De quoi susciter le raidissement des investisseurs internationaux.

Oui, sauf que simultanément, 67% des dirigeants d’entreprises cotées en France ont pro-activement réduit leur rémunération, ce qui n’a été le cas, en moyenne, que de 32% de leurs pairs au niveau mondial. En d’autres termes, les entreprises cotées en France ont demandé beaucoup d’efforts à leurs actionnaires, mais leurs dirigeants ont été financièrement exemplaires dans la crise.  Le point sensible va être, lors des prochaines assemblées, de savoir comment mesurer cette exemplarité : les critères extrafinanciers seront-ils suffisamment rodés ? Ils sont depuis plusieurs années pointés du doigt par les « proxy » comme le point faible des entreprises françaises.

Sur les sources de financement, les Français ont fait aussi différemment. Sans qu’aucun chiffre précis ne circule encore, de nombreux rapports d’analystes financiers font état de sous-capitalisation des sociétés, à l’échelle mondiale ; en France, le sujet a été provisoirement résolu avec l’afflux massif des prêts garantis par l’Etat (PGE) ; mais ces prêts vont devoir être remboursés. Des augmentations de capital massives vont, en substitution, être lancées – avec quel degré de dilution ? Déjà, en Australie où se déroule en ce moment la saison des assemblées générales annuelles,  le sujet pose problème : les taux de dilution proposés sont très largement supérieurs à ceux acceptés traditionnellement par les actionnaires internationaux.

Dernier point d’achoppement, la gouvernance. Beaucoup a été écrit sur les « AG à huis clos » et l’impossibilité pour les investisseurs, en France, de demander des révocations en séance, ou de proposer des administrateurs. Alors que dans les autres pays, notamment aux Etats-Unis, c’est possible. En France, les investisseurs pouvaient le faire en inscrivant cette résolution à l’ordre du jour – comme Amber Capital, cette année, chez Lagardère. C’était, jusqu’ici, un fait rarissime, signe d’une grande crise entre une société et ses actionnaires. Il se pourrait bien que ces propositions dites « résolutions dissidentes » deviennent plus fréquentes, si le format des « AG à huis clos » est reconduit et si le débat ne peut donc avoir lieu en séance.

Les mois à venir diront si les entreprises françaises peuvent encore cultiver leur différence, ou si elles vont se ré-aligner avec leurs consoeurs internationales.

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