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L’édito de Bénédicte Hautefort

Les pétroliers, nouveaux chouchous de la bourse

Les entreprises abordent le second semestre avec inquiétude, sauf les pétroliers. Vitupérés il y a deux mois, ce sont à présent les chouchous de la bourse.

Totalénergies, Shell, BP voient leurs cours grimper. C’est que le baril de pétrole approche les 110$ et pourrait atteindre 125$ cet été, indiquent les spécialistes. Il a atteint 140$ en mars, proche de son record absolu de 147,50$ en 2008. La pénurie de l’offre fait monter les prix : le blocage des sites en Lybie, les taxes à l’exportation en Inde, les conflits sociaux en Norvège, les difficultés de l’Opep à augmenter sa production, et bien sûr la guerre en Ukraine et l’embargo sur la Russie. Le pétrole russe représente la moitié de la balance commerciale du pays, un fort levier potentiel; l’Europe a déclaré un embargo de 90% effectif fin 2022. Mais sur le pétrole, pas sur le gaz ; et avant, les pays européens ont acheté 46 milliards de pétrole brut au cours des 100 premiers jours de la guerre en Ukraine, la plupart sur des contrats court terme. Une attitude que les ONG ont reproché aux « majors » lors des assemblées générales de ce printemps, soutenues publiquement par de nombreux gérants mondiaux.

Bien sûr, les investisseurs qui choisissent aujourd’hui les pétroliers ne sont peut-être pas les mêmes qui réclamaient en avril l’arrêt total des importations de pétrole russe. Les pétroliers ont-ils fait tourner leur actionnariat, ou est-ce l’actionnariat qui a changé d’avis ? le résultat est là : impopulaires ce printemps, ils sont à présent appréciés de leurs actionnaires, et chouchous de la bourse. Leurs contradicteurs les ONG, privées de leurs relais financiers, peinent à se faire une place dans les media. Et on parle de moins en moins de la guerre en Ukraine, qui pourtant empire.

La performance boursière des pétroliers est d’autant plus remarquable que les autres secteurs, eux, souffrent. Les marchés craignent une récession et rabattent de 15 à 20% leurs objectifs de cours. Ces valeurs cochent pourtant toutes les cases de la finance à impact, la protection du Climat, l’inclusion, le soutien à l’Ukraine. Moralité : toutes les places boursières d’Europe planchent sur l’importance des critères extrafinanciers, mais quand les difficultés s’annoncent et qu’il s’agit d’allouer son portefeuille, la perspective de gain à court terme prime.

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