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La seule qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous des sociétés cotées : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

La veille de l'HebdodesAG

La seule veille qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous de 700 sociétés cotées en France et à l'étranger : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

L'invité(e) est :

Jean Lambrechts Senior advisor chez Kienbaum

Senior advisor chez Kienbaum

 

« Sur les sujets de rémunération, certains conseils restent en retard par rapport à l’esprit de la réglementation »

 

Cette analyse des taux d’approbation du flottant relatifs aux résolutions sur les rémunérations est une première. Qu’est-ce qui vous a le plus frappé dans les résultats ?

Nous nous attendions évidemment à trouver des cas où les taux d’approbation des investisseurs ne seraient pas satisfaisants.

En revanche nous n’avions pas imaginé observer un niveau d’opposition à si grande échelle, même s’il y a des entreprises qui obtiennent des taux d’approbation du flottant élevés. Un quart des principales résolutions (Say on Pay sur les dirigeants mandataires sociaux, attribution d’actions, conventions réglementées) présentées par les grandes entreprises cotées françaises rencontre un taux d’opposition du flottant supérieur à 40%. Si l’on se réfère au standard émergeant au niveau international d’un taux d’opposition qui ne doit pas dépasser 20%, selon la catégorie de ces principales résolutions considérée, entre 40 et 70% des résolutions rencontrent un taux d’opposition du flottant supérieur à cette norme.

Comment expliquez-vous ce degré d’opposition des investisseurs alors qu’en France la réglementation et la soft law n’ont fait que se renforcer au cours des dix dernières années ?

Il existe des explications ponctuelles. Ainsi, des analyses plus poussées que nous avons conduites montrent que des packages dimensionnés agressivement par rapport aux pratiques du marché français réduisent les taux d’approbation des investisseurs.

Par ailleurs, les taux d’opposition particulièrement élevés que nous avons constatés sur les rémunérations des dirigeants mandataires sociaux autres que les premiers dirigeants s’expliquent, au dire des investisseurs et des agences de conseil de vote avec lesquels nous avons échangés, par une transparence encore insuffisante, notamment si on la compare à celle qui entoure les packages des CEO.

Mais au-delà de ces explications ponctuelles, l’explication de fonds est peut être une évolution de l’état d’esprit de certains conseils en retard par rapport à celle du cadre réglementaire. Seul le rejet effectif d’une résolution en AG reste susceptible de déclencher une réaction. Ainsi un  membre de comité des rémunérations nous disait encore récemment qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter du vote du flottant puisque l’entrée d’un investisseur ami au capital de l’entreprise sécuriserait définitivement l’approbation des résolutions !

La transposition de la directive européenne sur le droit des actionnaires dans le droit français pourrait-elle accélérer la prise de conscience ?

D’après les contacts que nous avons, le projet envisagerait de modifier la sanction liée au rejet d’une résolution relative aux rémunérations.

Aujourd’hui, la sanction liée au rejet d’une résolution Say on Pay ex post est le blocage du versement de la rémunération variable. Il est objecté que cette sanction est inadaptée : pourquoi sanctionner le dirigeant alors que c’est le Conseil, en principe en toute indépendance du dirigeant, qui a pris la décision de lui verser cette rémunération ?

Il s’agirait d’évoluer vers un modèle de type australien, pour faire simple, un modèle où un vote négatif sur le Say on Pay oblige l’entreprise à remettre au vote les mandats des administrateurs. Ceci, on l’imagine, mettrait en première ligne les membres du Comité des rémunérations et servirait d’électrochoc.

Cependant, cela suppose dans un premier temps que la résolution Say on Pay soit rejetée, ce qui est peu vraisemblable dans les entreprises où le Conseil exerce suffisamment de droits de vote. Il n’est donc pas certain que le modèle australien soit efficace dans les sociétés contrôlées.

Enfin, notre compréhension est que les émetteurs sont opposés au modèle australien. Ils craignent que des fonds activistes utilisent le vote sur les rémunérations comme un levier pour déstabiliser les Conseils.

Et les investisseurs, au vu des résultats, pourraient-ils augmenter la pression sur les Conseils?

D’abord, le taux de participation du flottant aux AG est en moyenne de moins de 60%. Une mobilisation plus forte du flottant pourrait dans certaines entreprises modifier sensiblement l’équilibre entre le poids en AG des votes du Conseil et du flottant, surtout si on se rappelle que le flottant détient globalement plus de 60% des droits de vote du SBF120.

Plus subtilement, la pression accrue des investisseurs pourrait  se manifester sous un autre angle.

D’abord, les investisseurs, dans leur décision d’investissement, prennent de plus en plus en compte des critères RSE. La qualité de la gouvernance fait partie de ces critères. Les taux d’approbation sur les rémunérations, en particulier au niveau du flottant, en constituent un excellent indicateur, au point où ISS, à la demande de ses clients investisseurs, a décidé de l’intégrer dans ses analyses. En conséquence, les entreprises qui continueront à ignorer l’opposition du flottant à leurs résolutions, risquent d’être boudées par certains investisseurs et voir leur multiple de valorisation sanctionné.

Ensuite, les investisseurs ont commencé à croiser les informations sur les administrateurs qui ont des mandats dans plusieurs entreprises. Un administrateur qui ferait partie d’un Comité des rémunérations d’une entreprise qui rencontre un fort taux d’opposition sur les rémunérations pourrait se voir sanctionner lors du renouvellement d’un mandat dans une autre entreprise.

A propos de Jean Lambrechts

Jean Lambrechts est senior advisor chez Kienbaum. Après une expérience internationale en finance et auprès de cabinets de conseil en stratégie, il se spécialise en conseil en rémunération des dirigeants, en gouvernance et en Value-Based Management, d’abord à Londres puis depuis une quinzaine d’années à Paris.

A propos de Kienbaum France

Kienbaum accompagne ses clients sur l’ensemble du cycle de gestion des dirigeants : recrutement, évaluation, développement des compétences de leadership et rémunération de la performance, en intervenant sur des populations allant des hauts potentiels confirmés aux plus hauts dirigeants en Europe, en Afrique, au Moyen-Orient et dans les marchés émergents.

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