L’édito de Bénédicte Hautefort

H1 2023 : la performance extrafinancière s’est imposée

Près de 400 sociétés cotées ont à présent publié leurs résultats semestriels, tous suivis par Scalens. La bourse est restée stable, malgré des nouvelles souvent meilleures que prévu : c’est que l’avenir, de l’avis de toutes ces entreprises, reste incertain.

Le chiffre d’affaires du CAC 40 a progressé de 7,6%, soit un à deux points au-dessus de l’inflation. Les entreprises ont réussi à faire passer aux clients finaux les hausses de prix. Souvent en montant en gamme, comme le soulignent les acteurs de l’automobile, Stellantis, Renault et Michelin. Edenred, nouvellement entré dans le CAC 40, affiche 25% de croissance.

Certains secteurs surperforment, par exemple la défense, où Airbus ou Safran affichent une croissance à deux chiffres. Le secteur du luxe est contrasté, avec LVMH et Hermès ont des croissances à deux chiffres, mais pas Kering, qui dégage 2% de croissance, soit moins que l’inflation.

D’autres secteurs sont en difficulté, comme les telecom, qui n’ont pour l’instant pas réussi à faire passer les hausses de prix ; où ceux qui ont été portés par les commandes Covid, comme Eurofins.

Au plan mondial, les entreprises allemandes et UK surperforment l’inflation avec des croissances à deux chiffres (+11%), les US encore plus car croissance à deux chiffres avec une inflation très basse.

La croissance UK et US est portée par le pétrole, l’Allemagne par l’automobile

Fait majeur de cette série de publications, la performance extrafinancière s’est aussi imposée. Dans le CAC 40, neuf sociétés sur dix communiquent un indicateur extrafinancier au semestre, vs une sur trois au premier semestre 2022. Il s’agit majoritairement d’indicateurs de réduction des émissions carbone, mais pas seulement. ArcelorMittal ouvre son communiqué de résultats par sa performance en santé et sécurité des employés, par exemple.

Ailleurs dans le monde, 68% des entreprises américaines communiquent sur un indicateur extrafinancier, progression remarquable dans un contexte où les majors pétroliers renoncent à leur stratégie Climat. En revanche, en Allemagne et au UK, la tendance s’est inversée, avec ce semestre seulement 65% (Allemagne) et 54% (UK) des entreprises qui communiquent sur leur stratégie de décarbonation. La stratégie énergétique du pays se concrétise par un recul des performances Climat.

Autre bonne nouvelle pour les actionnaires, les marges tiennent. Partout dans le monde, le résultat opérationnel progresse de quelques points de plus que le chiffre d’affaires, à 8,0%. La plupart des entreprises ont maintenu ou amélioré leurs marges. En France, cela s’est fait sans suppression d’emploi ; ailleurs dans le monde et en particulier aux Etats-Unis, les sociétés ont drastiquement baissé leurs coûts, avec des plans sociaux massifs en début d’année dans les banques et la technologie.

Les résultats nets progressent encore plus vite, de 13% en moyenne pour le CAC 40. Comptablement, cela signifie que les sociétés avaient anticipé les difficultés actuelles et constitué des provisions, qu’elles ont utilisées pour faire face aux hausses de matières premières.

Le bénéfice par action du CAC 40, lui, progresse de 9% seulement. En d’autres termes, il y a eu au premier semestre davantage d’émissions que d’annulations d’actions. Les émissions d’actions de ce début 2023 ont concerné surtout des plans d’épargne salariale, suivant en cela l’esprit du législateur et du Code Afep Medef qui incitent à impliquer davantage les salariés dans la gouvernance. Les campagnes de rachats d’actions ont été importantes, mais moins qu’en 2022. Au second semestre la tendance devrait s’inverser. Plus d’une société sur cinq annonce un rachat d’actions. Airbus, BNP Paribas, Stellantis notamment. Pour mémoire, c’est le bénéfice par action et non le résultat net qui a été choisi par les actionnaires au moment des assemblées 2023, quand ils ont fixé les règles du jeu des bonus des dirigeants pour cette année.

Restent des signes d’inquiétude. Les cashflows, eux, progressent moins vite que l’inflation, voire se réduisent. Pour le CAC 40, ils progressent de 6%, soit moins que le résultat opérationnel. Au-delà de la France, les cashflows sont en baisse : en Allemagne de 16%, aux Etats-Unis de 25%. Les entreprises se sont hâtées de les utiliser pour investir dans les outils de production et l’innovation, anticipant un renchérissement des coûts.

Pour le second semestre, plus d’un tiers des sociétés rehaussent leurs objectifs, mais ils restent inférieurs au premier semestre. En moyenne, elles prévoient seulement 4 à 6% de croissance. La bourse en a tiré ses conclusions : ce premier semestre était bon, mais wait and see.

Leave a Reply