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La seule qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous des sociétés cotées : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

La veille de l'HebdodesAG

La seule veille qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous de 700 sociétés cotées en France et à l'étranger : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

L'invité(e) est :

Patrick Sayer

« Il faut que les administrateurs de sociétés françaises puissent être rémunérés en actions, comme aux Etats-Unis»

« Il faut que les administrateurs de sociétés françaises puissent être rémunérés en actions, comme aux Etats-Unis»

L’Hebdo des AG publie ce soir une comparaison de la gouvernance des sociétés françaises et américaines ; un des aspects est le fait que les Conseils d’Administration américains sont beaucoup plus encadrés juridiquement

Nous avons tendance en France à abuser des « soft laws » ; c’est très bien et tout à fait recommandable pour tester de nouvelles pistes, mais une fois que la mesure est validée, il faut selon le cas, passer à la une loi ou au règlement . C’est vrai par exemple de la définition de l’indépendance des administrateurs ou de la prévention des conflits d’intérêt. Comme ces sujets sont laissés actuellement à l’interprétation des émetteurs ou de leurs conseils, on est en risque juridique ; cet excès de « soft law » est d’ailleurs source de contentieux.

Un autre aspect typique de la gouvernance « à la française » est sa grande diversité : davantage de femmes, davantage de salariés, davantage d’internationaux

La diversité est une bonne chose et j’ai moi-même toujours été en faveur de la promotion des femmes. Mais aujourd’hui, nous sommes arrivés à un système trop rigide. Il faudrait pouvoir disposer de plus de souplesse, pouvoir au cas par cas nommer un administrateur quel que soit son genre,  pour un temps limité par exemple, s’il correspond mieux au profil recherché.

Quant à la diversité géographique, on compare des entreprises qui ne sont pas comparables : d’un côté, les entreprises françaises, pour lesquelles il est vital de réussir à l’international, et donc d’intégrer dans leur Conseil cette compétence ; de l’autre, les géantes américaines, qui parfois n’ont même pas besoin d’aller au-delà de leur immense marché domestique – et donc, de mon point de vue, le fait que les Boards américains soient très peu internationaux n’est pas nécessairement une faiblesse.  C’est simplement que leurs entreprises en ont moins besoin.

Les administrateurs en France sont relativement jeune (58 ans), plus qu’aux Etats-Unis

Je ne pense pas que l’âge ait une importance, et que les administrateurs américains, avec 63 ans d’âge moyen, soient moins dans la course que les Français. Ces quelques années d’écart feraient la différence si, aux Etats-Unis, on prenait sa retraite à 60 ans : on aurait en France des administrateurs « actifs » et aux  Etats-Unis des « retraités ». Mais ce n’est pas le cas ; l’usage, outre-Atlantique, est d’avoir une première carrière opérationnelle jusque vers 50-55 ans, puis d’aborder une « vie d’après », faite notamment de responsabilités en Boards, avec un véritable recul. Je préfère pour ma part des administrateurs plus âgés qui disposent du temps nécessaire pour préparer les Conseils. 

Comment expliquez-vous que les Conseils français soient moins indépendants ?

Les administrateurs indépendants sont en quelque sorte un luxe que les sociétés peuvent se permettre quand elles grandissent et atteignent une taille critique. Les sociétés américaines sont plus grandes, moins OPA-bles, elles peuvent se permettre d’avoir de nombreux administrateurs indépendants.

Même au sein des sociétés françaises, vous observez un taux d’indépendance supérieur dans le CAC40 que dans les plus petites sociétés cotées : celles-là doivent, d’abord, penser à constituer un cœur d’actionnaires de long terme, fidèles, souvent les fondateurs et leurs familles, souvent liés par un pacte. C’est cette structure d’actionnariat qui est reflétée par le Conseil d’Administration. Au fond, la proportion relativement faible d’administrateurs indépendants reflète hélas le manque de taille critique de nos sociétés.

Un dernier trait différenciant est le mode de rémunération des administrateurs : en France, il n’est pas possible d’attribuer des actions gratuites aux administrateurs – un pas a été franchi avec la loi PACTE et les BSPCE, mais seulement pour les administrateurs de petites sociétés cotées (jusqu’à 150 Meuros de capitalisation boursière).

C’est une grande différence et une erreur de mon point de vue, qui change totalement l’état d’esprit des Conseils d’Administration. Un administrateur, aux Etats-Unis, détient souvent en actions l’équivalent de 8 à 10 ans de jetons de présence, jetons qui sont eux-mêmes 2 à 3 fois supérieurs aux jetons français ; ce sont des actions qui lui  ont été attribuées par la société. Le résultat se traduit souvent par un esprit infiniment plus entrepreneurial des administrateurs des sociétés américaines sans que leur indépendance, au contraire, soit remise en question.

BIO

Patrick Sayer est aujourd’hui Président de la SAS AUGUSTA et membre du Conseil de Surveillance d’EURAZEO.

Il a été Président du Directoire d’Eurazeo de 2002 à 2018. En mars 2018, il a passé le relais à Virginie Morgon,  tout en restant membre du Conseil de Surveillance. Il était précédemment Associé-Gérant de Lazard Frères et Cie à Paris qu’il a rejoint en 1982 et Managing Director de Lazard Frères & Co à New York, où il était notamment responsable mondial en charge des medias et de la technologie..
Patrick Sayer est membre du Conseil de Surveillance d’Europcar, Administrateur de Valeo et TechData (USA).

Il est par ailleurs Juge Consulaire au Tribunal de Commerce de Paris.

Patrick Sayer est diplômé de l’Ecole Polytechnique (1980), de l’Ecole des Mines de Paris (1982). Il est Officier de la Légion d’Honneur (2017).

Il a publié, avec Maxime de Bentzmann, en 2013, « les 100 mots du capital-investissement », chez PUF, pour expliquer comment le private equity est devenu une source incontournable de financement et de développement des entreprises.

Il est également Juge au Tribunal de commerce de Paris, et Président de la société Augusta, family-office.

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