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L'invité(e) est :

L’invité : Henry Huyghues Despointes, Senior adviser chez 21 Central partners

Les règles de gouvernance s’appliquent partout de la même façon. Ce qui influe, c’est la personnalité du dirigeant.

Henry Huyghues Despointes, vous êtes senior adviser chez  21 Central partners, société de private equity. Ce secteur est la deuxième source de financement des entreprises en France. Que leur apporte-t-il en termes de gouvernance ?

Il a eu, a et aura un apport spécifique de plus en plus important dans la mesure où, ces trente dernières années, les missions des administrateurs ont considérablement évolué. Je précise que mon discours portera essentiellement sur les midcaps : en early stage et large caps, les choses sont un peu différentes. En midcap, nous sommes très impliqués dans la vie des entreprises. Jusque dans les années 90, le Conseil d’administration était pour beaucoup de chefs d’entreprise un mal nécessaire. La société de private equity entrant dans le capital d’une entreprise demandait un poste d’administrateur mais il s’agissait d’une procédure formelle sans grande utilité la plupart du temps. C’est la crise monétaire de ces années 90 qui a donné de l’ampleur au rôle d’administrateur. Le private equity était très investi dans le tissu des moyennes entreprises qui ont été frappées de plein fouet par les hauts niveaux de taux d’intérêt élevés adoptés en France après la réunification de l’Allemagne. Il a fallu challenger les chefs d’entreprise pour obtenir des reportings permettant des prises de décisions efficaces et rapides, avant que l’entreprise n’entre dans de graves difficultés. Cette expérience nous a aidé à être plus proches des chefs d’entreprises et à partager nos expertises avec eux. Le rôle d’administrateur venant du private equity a ainsi adopté un aspect plus positif, celui de l’aide au développement des entreprises.

Les chefs d’entreprise étaient-ils alors demandeurs ?

Pas vraiment dans les midcaps. Elles étaient souvent dirigées par leur fondateur qui recherchait du financement, éventuellement quelques conseils et éprouvait souvent des difficultés à faire fonctionner son Conseil d’administration. Celui-ci était plus une chambre d’enregistrement qu’un outil d’aide à la croissance et à la mise en place d’une stratégie d’entreprise. Aujourd’hui, la position des dirigeants a-t-elle changé à l’égard des administrateurs ? Bien sûr, ils se sont rendus compte que ce mode de fonctionnement leur était utile. Il reste, mais elles sont rares, des personnalités très fortes dans certains secteurs d’activité qui n’accordent pas d’importance au Conseil. Pratiquement, lors d’un

   « first time LBO », il s’enclenche un processus d’apprentissage mais si l’entreprise recourt au private equity, c’est parce qu’elle est en croissance, qu’elle a des projets de développement internes ou externes, et qu’il lui faut donc des compétences qu’elle ne possède pas à l’instant T.

En quoi le rôle de l’administrateur investisseur se distingue-t-il de celui des autres administrateurs ?

Un administrateur investisseur est à la fois investisseur et actionnaire mais il se distingue des administrateurs représentants des actionnaires car ces derniers nomment les membres du Conseil qui appliqueront la stratégie de leur entreprise. Dans le private equity spécialisé dans le midcap, le secteur que nous connaissons le mieux, il nous arrive rarement de prendre des administrateurs indépendants. Il faut qu’ils possèdent un lien d’excellence avec l’entreprise et d’expertise de son secteur et cela quel que soit ce dernier.  Il nous arrive ainsi de demander à une personne que nous aurons consultée avant la prise de participation d’entrer dans le Conseil.  Dans les large caps en revanche, les administrateurs indépendants sont des personnalités qui viennent s’adjoindre à d’autres personnalités aux rôles différents de ceux nécessaires aux entreprises de taille moyenne.

L’administrateur investisseur, même minoritaire jouit-il systématiquement d’un droit de regard pour les décisions importantes ?

Cela dépend du pacte d’actionnaires et non pas de son rôle classique, à ceci près qu’un administrateur est responsable. S’il est démontré qu’il n’a pas fait preuve des diligences nécessaires à sa mission, il peut se retrouver devant les tribunaux. Vous constaterez qu’aujourd’hui très rares sont les administrateurs poursuivis en justice, contrairement à ce qui se passait à la fin des années 90. Cela démontre la professionnalisation de la fonction qui a bien traversé la crise de 2008-2012, pourtant très violente.  Je pense à ce propos à un exemple bien précis, dont je ne peux dire le nom car elle est cotée. Son Président-fondateur nous a dit que, sans l’administrateur à ses côtés, son entreprise n’aurait pas survécu. Pourquoi ? Tout simplement en raison des niveaux d’exigence des reportings. Lors d’un échange récent avec mes collègues de l’AFIC, nous partagions le même constat : la première utilité d’un administrateur de private equity est la mise en place de reportings. Tant l’administrateur, le Conseil que le dirigeant sont ainsi plus réactifs. Au départ, une entreprise est gérée à l’intuition mais au fur et à mesure de sa croissance, des outils d’aide à la décision s’imposent. J’ai été administrateur d’une vingtaine d’entreprises qui pour beaucoup se sont développées –sinon je ne continuerai pas ce métier. La courbe d’expériences des administrateurs de private equity est applicable à toutes les entreprises accompagnées.

Comment éviter les risques de conflit d’intérêt ?

J’ai connu une fois, il y a longtemps, une entreprise de private equity qui était entrée au capital de deux entreprises au métier quasiment identique, avec pour objectif la mise en place de synergies, a priori créatrices de valeur. Dans la réalité, les deux entreprises se sont livrées à une bataille à mort et l’une d’entre elles a disparu. Heureusement, de telles situations sont rares, prévisibles et donc évitables.

Vous avez été administrateur d’une vingtaine de sociétés, ainsi que de leurs filiales. De cette expertise, pourriez-vous dire s’il existe ou non des différences dans la gouvernance des entreprises selon leur secteur, leur niveau de maturité ?

Les règles de gouvernance s’appliquent de la même façon. Ce qui influe, c’est la personnalité du dirigeant. Certains sont plus ouverts et seront plus à même de développer leur entreprise traverser et surmonter les crises.

Le BTP est connu pour la force de caractère de certains de ses patrons mais il n’est pas le seul secteur concerné. Nous avons vécu une expérience récente avec un patron d’une entreprise industrielle dont nous étions majoritaire avec les deux tiers du capital et nous ne pouvions strictement rien dire. Quand le dirigeant est indispensable, la marge de manœuvre de l’administrateur investisseur est en effet très limitée. Cela s’est bien terminé mais c’est une personne qui travaillera toujours seule. Heureusement, ce type de dirigeant est assez rare. Nous sommes dans un monde très mondialisé où la France conserve encore un bel outil industriel avec des pépites exceptionnelles. Je pense notamment à la sous-traitance automobile, un secteur où nous étions très présent avant la crise de 2008. Il faut savoir les accompagner à l’international. Il faut aussi avoir le courage de rester un peu plus longtemps que quatre ou cinq ans au capital d’une entreprise. Ce laps de temps est trop court, surtout s’il est traversé par une crise. Il nous est arrivé de céder nos participations dans des entreprises juste après la crise parce que nous y étions obligés de sortir, le fond étant en clôture. Le vendeur ensuite s’en est réjoui : nous avions fait tout le travail de redressement et il a récolté six fois sa mise. Aujourd’hui, des fonds commencent à se lever avec des perspectives plus lointaines, de sept à dix ans, et cette tendance me paraît positive.

Investissez-vous aussi dans le secteur des nouvelles technologies ?

Peu, car nous sommes spécialisés dans les midcaps alors que les nouvelles technologies comptent surtout du « early stage ». Je le fais à titre personnel, avec beaucoup de casse bien sûr, mais aussi pour des sociétés qui s’internationalisent vite. Elles sont souvent dirigées par des ingénieurs plus que par des diplômés d’écoles de commerce, ce qui reflète là aussi l’un des grands atouts de la France.

Propos recueillis par Marie Lafourcade

Henry Huyghues Despointes a rejoint 21 Central Partners à sa création en 1998. Auparavant il travaillait comme Fondé de Pouvoir aux côtés de Gérard Pluvinet. De 1978 à 1987, Henry Huyghues Despointes était responsable des audits industriels et financiers, des fusions & acquisitions et de la consolidation de CGE/Alcatel-Alsthom. Henry Huyghues Despointes est titulaire d’un diplôme de Biologie et d’un DECS. Il est membre de la Société Française des Analystes Financiers.

21 CENTRAL PARTNER

Créée il y a vingt-quatre ans, 21 Central partners est une société de private equity présente en France, Italie et Pologne, spécialisée dans les sociétés de taille moyenne, du « mid-market », avec une approche centrée sur la création de valeur. La société dirigée par Alessandro Benetton et, en France, par Gérard Pluvinet a par ailleurs été récompensée du prix « ESG Best Practices Honour 2017 » remis par SWEN Capital Partners qui évalue les pratiques sociétales et environnementales de plus de deux cents sociétés de private equity dans le monde.

21 Central Partners a également remporté le Prix « Real Deals 2017 » remis à Londres dans la catégorie France & Benelux deal of the year avec Digital Virgo. Parmi ses investissements, citons le distributeur de bijoux Cleor, Synerlab, façonneur pharmaceutique de niches, l’éditeur de logiciels DL Software, Skill&You, leader de l’e-learning en France ou encore Coyote Systèmes.

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