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L'édito de Bénédicte Hautefort

Rémunération des dirigeants : le « P4P » est-il mort ?

L’étude annuelle de Proxinvest vient de paraître, et comme chaque année donne le « la » du dialogue entreprise-actionnaires en matière de rémunération des dirigeants. Cette édition lance un pavé dans la mare : Proxinvest démontre, chiffres à l’appui, que la performance actionnariale n’est pas au rendez-vous, alors que les rémunérations des dirigeants augmentent. En cela, l’agence de recommandation de vote rejoint les observations de nombreux acteurs, américains notamment. Et pourtant, depuis 10 ans, dans toutes les entreprises cotées du monde, les Comités de Rémunérations, les équipes RH, et tout un écosystèmes de conseils spécialisés font des efforts considérables de formalisation des critères de variable, de benchmark, de transparence et d’information des actionnaires.

Tout cela … n’aurait servi à rien ? Et surtout, que faire maintenant ?

Les détracteurs de la philosophie « P4P » (« Pay for Performance ») s’appuient en général sur l’observation que la motivation financière ne suffit pas à mobiliser toute l’énergie d’une personne. Appliquée à un dirigeant de société cotée, cette observation signifie que le dirigeant peut tout à fait atteindre les objectifs qui déclenchent son bonus financier tout en restant en-deçà sur ses autres moteurs personnels, en conséquence sans se donner à fond, d’où un déficit de création de valeur actionnariale. Les études américaines sur le sujet citent, comme exemples de moteurs personnels d’un dirigeant qui ne peuvent pas être transcrits en critères de performance « P4P », la confiance en ses partenaires, la reconnaissance sociétale, le sentiment d’être aimé par ses troupes. Or, depuis plusieurs années, le fait est que nos « patrons » du CAC40 ne sont pas épargnés par l’opinion publique, que le climat social dans plusieurs de ces groupes a été éprouvé par des « relocalisations » et que le turnover de plus en plus rapide des dirigeants ne favorise pas leur sérénité. Ces facteurs peuvent-ils impacter négativement la création de valeur ? Quelles leçons en tirer pour le dialogue actionnarial ? A méditer.

Cependant, Proxinvest n’est pas sur cette vision américaine extrême. Pour l’agence de recommandation de vote, le « P4P » n’est pas mort. A l’inverse, la mécanique de critères de performance doit plutôt être renforcée.

Observons enfin que les grands investisseurs internationaux ont en 2018 encore largement approuvé les « bonus » des dirigeants. Ils y ont donc trouvé leur compte : ce ne ne sont pas des philanthropes. Alors que toutes les sociétés cotées sont en train de « plancher » sur les critères de performance 2019, ce sont les motivations de ces investisseurs qu’il faut mieux comprendre. Le « P4P » a encore de l’avenir, reste à savoir de quelle performance il est question.

  B.H

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