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La veille de l'Hebdo des AG

L'édito de Bénédicte Hautefort

Administrateurs salariés : la loi PACTE, stratégie des « petits pas »
 
Au moment où toutes les entreprises se préparent à appliquer la loi PACTE, l’Hebdo des AG a mesuré l’impact réel de la nomination des administrateurs salariés, une des mesures-phares.
Quantitativement, la loi PACTE ne va pas bouleverser les équilibres : dans le SBF 120, 12 nouveaux administrateurs salariés devraient être nommés, s’ajoutant aux 103 déjà en place. C’est peu. La proportion d’administrateurs salariés dans les Conseils d’Administration passera de 7% à 8% en moyenne, et pour la moitié des entreprises du SBF120, les salariés seront toujours absents des organes de gouvernance. Nous restons loin de l’esprit de 1983 et de la présence de 30% d’administrateurs salariés dans les entreprises publiques ou privatisées, ou encore du rapport Gallois, à l’origine de la succession de lois en la matière (Sapin puis Rebsamen puis maintenant loi PACTE) – le rapport Gallois remettait sur le haut de la pile cet objectif de 30%.
Symboliquement, pourtant, la loi PACTE est essentielle. Parce que cela place le sujet au-dessus des querelles politiques : quelle que soit la couleur du gouvernement, renforcer la place des salariés dans la gouvernance est une priorité. En d’autres termes, il ne s’agit plus d’une mesure « de gauche ». La loi PACTE réconcilie des parties qui s’opposaient.
C’est que la mesure, depuis l’origine, a de fervents supporters et d’ardents détracteurs. Les supporters de la loi, ce sont les politiques, et les actionnaires salariés. L’Hebdo des AG publie une interview de M. Loïc Desmonceaux, Président de la Fédération des Actionnaires Salariés (FAS) : la France a une grande tradition d’actionnariat salarié, mais nombreuses sont encore les entreprises qui ont des actionnaires salariés mais aucun représenté au Conseil d’Administration.
Les détracteurs, en face, sont nombreux. La moitié des entreprises du SBF120 sont restées sur la position initiale de l’Afep (en 2003 – les choses ont radicalement changé depuis), s’interrogeant sur le fait de savoir dans quelle mesure la nomination d’administrateurs salariés était une prise de pouvoir des syndicats.
Du côté des sceptiques, on trouve également les syndicats, plus précisément le niveau supérieur des confédérations syndicales. Sur ce sujet, l’Hebdo des AG publie aujourd’hui un extrait des travaux de Mme Aline Conchon, chercheure au CNAM et auteure d’une enquête empirique relative sur les rôles et activités des administrateurs salariés de 17 pays européens : en France, les syndicats n’étaient pas demandeurs, voire même hostiles à la responsabilité d’administrateurs – ce sont les « sous-sections » syndicales, voire les salariés non syndiqués, qui ont poussé à la roue.
Enfin, dans une position neutre, les investisseurs institutionnels complètent le tableau. S’ils sont neutres, c’est parce qu’ils ne votent pas pour élire ces administrateurs salariés, qui ont les mêmes pouvoirs et les mêmes devoirs que les administrateurs élus par l’assemblée générale. Ils sont neutres, alors qu’ils pourraient être moteurs : sur la féminisation des conseils, par exemple, ils ont fait pression sur les entreprises pour aller plus vite et plus loin que la loi. La neutralité des investisseurs, en d’autres termes, est un signal plutôt négatif de leur part.
L’enjeu de la loi PACTE, c’est de démontrer que les administrateurs salariés sont bénéfiques pour la gouvernance – avec la stratégie des « petits pas », un pied devant l’autre, face à tous ces détracteurs
 

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