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L’édito de Bénédicte Hautefort

La rotation des dirigeants s’accélère, la violence verbale est montée d’un cran, et la transparence recule.

La rotation des dirigeants s’accélère, la violence verbale est montée d’un cran, et la transparence recule. Et les investisseurs sanctionnent les entreprises qui n’expliquent pas.

Ose Immuno est une biotech française à succès, connue par son travail sur le vaccin contre la Covid-19. Elle annonce ce mois-ci l’arrivée d’un nouveau dirigeant, « à effet immédiat ». Le prédécesseur n’était arrivé qu’en juillet, il y a à peine trois mois. Même mouvement chez la chaine de distribution CNova, qui nomme un nouveau directeur financier six mois à peine après le précédent, qui avait pourtant quinze ans de maison et était donc bien connu du Conseil. Et également le spécialiste des stations de sports d’hiver Compagnie des Alpes, qui officiellement avance tout à coup le départ en retraite de son PDG, initialement prévu en 2025. On se souvient d’Atos, qui s’est séparé en juillet de son directeur général arrivé en janvier ; officiellement, c’était une démission. Et il y a eu aussi le limogeage du DG d’Orpea en janvier, et ailleurs en Europe le départ inattendu du DG de Philips, suite au rappel massifs d’appareils de traitement de l’apnée du sommeil, occasionnant une perte de 1,3 milliard de dollars.


Annoncer un changement de dirigeant, c’est le travail du Conseil d’Administration. Remercier le prédécesseur en reconnaissant sa contribution, c’est l’usage. C’est encore plus important aujourd’hui, avec la prise de conscience que la qualité d’ambiance au travail fait partie de la performance extrafinancière de l’entreprise.

Compagnie des Alpes est pourtant le seul qui prend des gants pour cette annonce. Peut-être parce que son actionnaire de référence est la Caisse des Dépôts, aux valeurs humaines solides. Ose Immuno et CNova parlent sans détours de « révocation par le Conseil ». Une violence verbale qui surprend en France, en 2022. Deux fois en une semaine, c’est beaucoup pour la place de Paris. La dernière révocation de dirigeant de société cotée en France, c’était en 2020, Emmanuel Faber, alors DG de Danone. Le Conseil avait alors sobrement indiqué qu’il « avait mis fin aux fonctions d’Emmanuel Faber comme Président-Directeur Général ». Le mot « révocation » n’avait été prononcé que par les media.

Adopter un tel franc-parler pourrait passer pour une volonté de transparence et donc aller dans le bon sens. La décision prise par ces conseils est bel et bien, juridiquement, une révocation. Mais la transparence a des limites : nul ne dit ce qui a motivé la brusque décision de faire partir le dirigeant encensé hier. Ce n’est pas la performance opérationnelle, qui est excellente. Ose Immuno a annoncé de très bonnes nouvelles, comme CNova et Compagnie des Alpes.

Le jour de ces annonces, ces sociétés ont perdu entre 5 et 10% en bourse. Les investisseurs n’aiment pas ne pas comprendre. La violence verbale n’a servi à rien en bourse, et a sûrement laissé des traces en interne.

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