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La seule qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous des sociétés cotées : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

La veille de l'HebdodesAG

La seule veille qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous de 700 sociétés cotées en France et à l'étranger : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

L'invité(e) est :

Astrid Milsan

Astrid Milsan Secrétaire générale adjointe en charge de la Direction des émetteurs et de la Direction des affaires comptables / AMF

Nous appelons la place de Paris à se mobiliser pour le vote électronique, en direct en AG

L’AMF vient de publier l’édition 2020 du Rapport sur le Gouvernement d’Entreprise et la Rémunération des dirigeants des sociétés cotées. Quel bilan tirez-vous personnellement de cette année d’assemblées qui se sont très souvent tenues « à huis clos »?

 L’AMF a établi un bilan contrasté de cette pratique des assemblée générales à huis clos, c’est-à-dire d’assemblées tenues hors la présence des actionnaires, qui s’est très largement répandue puisque sur notre échantillon de 118 sociétés, 110 ont opté pour cette formule. Il faut souligner que c’était la seule façon, en pleine crise sanitaire, de tenir les assemblées et de faire voter des décisions nécessaires au fonctionnement des sociétés. Un autre élément positif, le fait que les actionnaires ont joué le jeu : les taux de participation sont aussi hauts qu’en 2019. Enfin, autre bonne pratique, l’initiative de nombreuses sociétés de retransmettre leur assemblée en direct ou en différé, par vidéo ou par audio ; elles ont été 80% à le faire, conformément aux recommandations de l’AMF. 

 En contrepoint, vous alertez cependant sur des atteintes aux droits des actionnaires, 

Nous avons constaté que 20% de sociétés qui n’ont proposé aucune retransmission à leurs actionnaires. Par ailleurs, si certaines sociétés ont offert aux actionnaires la possibilité de voter de manière électronique avant l’assemblée, aucune n’a offert cette possibilité en direct lors de l’AG, ce que nous déplorons particulièrement dans le contexte des AG à huis clos. Autres points négatifs que nous regrettons : nous avons constaté qu’un très grand nombre d’émetteurs n’ont pas désigné les scrutateurs parmi les actionnaires et n’ont pas donné d’information à ce sujet ; nous recommandons de choisir les scrutateurs exclusivement parmi les principaux actionnaires. Autre sujet d’inquiétude, le fait que les actionnaires ne puissent pas déposer de résolutions ou nommer ou révoquer des administrateurs en séance. Le fait de ne pas pouvoir poser de questions en direct est aussi une atteinte aux droits des actionnaires ; comme celui de ne pas pouvoir voter en direct. 

Plusieurs sociétés ont proposé des plateformes pour poser des questions en direct, ne pensez-vous pas que c’est une bonne pratique à recommander ? 

Nous avions recommandé en mars dernier que les sociétés acceptent les questions de leurs actionnaires au-delà du délai fixé par la loi (article L.225-108). 25% des sociétés l’ont fait, et certaines sociétés ont par ailleurs mis en place des systèmes de plateformes électroniques, où les actionnaires pouvaient envoyer leurs questions au fur et à mesure. Mais il n’y a pas eu, de notre point de vue, suffisamment de transparence sur le nombre de questions, leurs thématiques et le processus de sélection de celles qui ont été traitées en séance. Nous recommandons aux émetteurs de publier l’intégralité des questions et des réponses sur leur site internet.

 Vous souhaitez également que le vote à distance en direct soit possible 

En droit, le vote électronique est possible depuis vingt ans, depuis la loi NRE. Mais les sociétés françaises ne permettent pas à leurs actionnaires de voter en direct, invoquant notamment des questions techniques et de fiabilité. Certains émetteurs mettent ainsi en avant qu’ils n’auraient pas les moyens de s’assurer de l’identité des personnes qui votent. Il est difficile de comprendre pourquoi on pourrait identifier les actionnaires de façon fiable lors d’un vote électronique par Votaccess avant l’assemblée générale et pas au cours de cette même assemblée. Nous appelons la place à se mobiliser : émetteurs, associations professionnelles, centralisateurs doivent travailler ensemble sur ce sujet, notamment sur les modalités techniques et sur les coûts.  Il existe par exemple des expérimentations sur des technologies de type blockchain, qui permettent de fiabiliser les contrôles d’identification et pourraient peut-être permettre de déployer des solutions adaptées en France. Des prestataires travaillent en ce moment à cet effet. Dans d’autres pays, le vote électronique en direct existe d’ores et déjà.  

Autre fait marquant de cette année 2020 : l’intensité de l’activisme. Dans son rapport, l’AMF a simplement rappelé la position qu’elle avait prise en avril dernier. La position du régulateur n’est pas d’empêcher l’activisme mais de se donner la capacité d’en maîtriser les excès. Le cadre réglementaire nous apparaît globalement adapté et nous n’avons donc proposé que quelques ajustements. D’ici le début de l’année prochaine, nous ajusterons notre doctrine sur le sujet. Pour en revenir aux contestations de la saison 2020 des AG, je tiens à souligner qu’en matière de démocratie actionnariale, la contestation des stratégies non créatrices de valeur est légitime et saine, pour autant qu’elle se fasse dans le respect de la réglementation. 

La « Raison d’Etre » a également été au centre des débats cette année, et vous vous exprimez sur le sujet. 

Nombreuses sont les sociétés qui ont communiqué sur leur « Raison d’Etre » ; certaines l’ont inscrites dans leurs statuts. L’AMF a souligné qu’il est à présent important de bien expliquer la portée opérationnelle de ces « Raisons d’Etre », la façon dont elles sont déclinées. Leur portée juridique, également, n’est pas encore très bien appréhendée. La jurisprudence et la pratique permettront à terme d’en définir plus précisément la portée. 

Autre sujet de gouvernance, l’indépendance des administrateurs. Vous alertez sur le recul de l’indépendance des Comités du Conseil

 En effet. Nous nous inquiétons notamment du fait que certains administrateurs qualifiés de non indépendants une année deviennent indépendants l’année suivante du fait de l’évolution de leur situation personnelle. Nous recommandons aux sociétés de mettre en place un délai de carence avant ce changement de qualification.  

Sujet nouveau : les conditions de renouvellement des commissaires aux comptes

Nous avons constaté que l’information donnée en assemblée générale sur la procédure d’appel d’offre lors du renouvellement des commissaires aux comptes était souvent incomplète. 

La mixité des instances dirigeantes est un thème important cette année

 Il s’agit de l’information des sociétés quant à la féminisation de leurs instances dirigeantes, une nouveauté cette année. Sur ce sujet, la compétence de l’AMF est de vérifier l’information requise par le Code AFEP-MEDEF. Nous avons observé, pour cette première année, une très grande variété de périmètres d’instances dirigeantes utilisés ainsi qu’un manque de précision sur ces périmètres.

 Vous notez la même hétérogénéité sur les ratios d’équité

 Le niveau d’information et les modalités de calcul des ratios d’équité sont en effet très disparates d’une société à l’autre. Le législateur a laissé une grande liberté aux sociétés ; des guidelines de l’AFEP ont essayé de cadrer les pratiques mais ce guide, élaboré sans consultation de la place et à destination des seuls adhérents de l’AFEP, ne constitue pas un guide de place. La question se pose de savoir pourquoi les sociétés ne retiennent pas l’ensemble des éléments de rémunérations des dirigeants et quel est le périmètre des salariés à prendre en comparaison. Pour permettre de bien comprendre les évolutions, nous recommandons, par exemple, d’expliciter et de justifier le périmètre des salariés et des éléments de rémunération des dirigeants retenus et de communiquer le ratio d’équité par fonction puis par personne. 

La rémunération des dirigeants, enfin, a de nouveau été un sujet important 

Cette année a été marquée par beaucoup de nouveautés : les annonces de réduction de rémunérations pour 2019 et surtout 2020 dans le contexte de crise sanitaire et l’entrée en application de la nouvelle loi sur les rémunérations des dirigeants. La question, pour 2021, va être de savoir si les critères auront fortement évolué du fait de la crise et dans quelle mesure les politiques de rémunérations votées en assemblée générale auront été modifiées. 

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