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La seule qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous des sociétés cotées : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

La veille de l'HebdodesAG

La seule veille qui repose sur la présence effective à TOUS les rendez-vous de 700 sociétés cotées en France et à l'étranger : assemblées générales annuelles et extraordinaires, présentations de résultats semestriels et annuels, investor days

L'invité(e) est :

Jean Lambrechts

Jean Lambrechts, associé d’Essere, conseil en rémunération des dirigeants

Jean Lambrechts est ingénieur de gestion de l’université de Louvain et titulaire d’un MBA de l’université de Chicago. Il est trilingue français, anglais et néerlandais Après des expériences réussies chez PETROFINA, FORTIS et AT KEARNEY à Bruxelles puis à Londres, Jean a rejoint à Londres la société de conseil américaine SCA ASSOCIATES, cabinet spécialisé en rémunération des dirigeants et en VBM (value-based management). Il y a transposé des méthodes quantitatives pour la constitution de “pay comparator groups”, pour le design de “long-term incentives” (LTI), notamment la constitution de “performance comparator groups” en support des critères de TSR, la valorisation économique des LTI, l’identification des leviers de création de valeur et la fixation des niveaux d’objectifs à atteindre. En 2003, après le rachat de SCA par la société MERCER, il intègre le cabinet HEWITT ASSOCIATES (devenu AON HEWITT), d’abord à Londres, puis à Paris, où il dirigera pendant près de dix ans l’activité de conseil en rémunération des dirigeants, avant de rejoindre le cabinet indépendant ESSERE ASSOCIES. Dans un contexte d’enjeux croissants de gouvernance, il se rapproche de l’IFA (INSTITUT FRANCAIS DES ADMINISTRATEURS) où il contribue aux premières loges au développement des bonnes pratiques de gouvernance de la rémunération en France. Il accompagne les comités de rémunération, les directions générales, les directions financières et RH, ainsi que les relations investisseurs. Il conseille les entreprises de toutes tailles, du grand groupe coté à l’entreprise familiale non cotée, en passant par la coopérative. Il intervient dans de très nombreux forums.

Nous sommes de plus en plus consultés sur les questions d’équité des rémunérations dans l’entreprise.

Sur quels thèmes portent les questions de vos clients en 2017 ? Quelles évolutions vs 2016 ?

Les évolutions législatives, notamment fiscales, et d’exigences en matière de gouvernance sont des facteurs qui impulsent généralement des thèmes communs aux entreprises. Ainsi la fiscalité alourdie de la rémunération en capital au début du quinquennat écoulé nous a amené à travailler sur des plans alternatifs en cash. Depuis 2015/2016, les actions de performance « loi Macron », même partiellement détricotées, ont ravivé l’intérêt pour des plans en actions. Autre exemple, La fiscalité devenue rédhibitoire sur les régimes de retraite à prestations définies et l’obligation d’y associer des conditions de performance encouragent les entreprises à considérer des outils alternatifs. Plus récemment, des questions apparaissent autour de l’équité des rémunérations dans l’entreprise et le déploiement (encore discret) du « P4P » d’ISS en Europe met en lumière la question des panels de comparaison (peer groups). Sur ce dernier point, nous observons régulièrement une confusion entre pay comparator group et performance comparator group qui ne sont pas nécessairement les mêmes. » En remontant plus avant (avant le premier Say-on-Pay) est-ce que le fait que la rémunération des dirigeants fasse l’objet d’un vote a modifié l’état d’esprit de vos clients ? avec la loi Spain 2 et le vote devenant contraignant en 2018, vous attendez-vous à une nouvelle évolution ? Au début, le Say-on-Pay consultatif nous a impliqué dans des projets de renforcement de la communication autour de la rémunération des dirigeants. Déjà, nous avons sensibilisé nos clients sur le besoin d’aborder le fond, notamment la spécification de la finalité de chacun des composants de la rémunération. Ces échanges sur le fond ont d’ailleurs à certaines occasions pu induire des inflexions des pratiques de rémunération. Puis la poussière est en partie retombée lorsque les entreprises ont considéré qu’elles maîtrisaient le Say-on-Pay consultatif. Cette année, la partie ex ante du vote Say-on-Pay contraignant portera sur les principes. Il sera très intéressant d’observer comment les émetteurs et les investisseurs interpréteront le concept de principe. Sera-t-il interprété comme un vote sur les mécanismes des composants de rémunération (un vote sur le « comment ») ou également un vote sur le « pourquoi du comment » ? Par exemple, l’entreprise pourra-t-elle se contenter d’expliquer que l’acquisition des actions de performance est conditionnée par tel ou tel indicateur ou les investisseurs attendront-ils que l’entreprise explique le choix de ce critère au regard de la stratégie de création de valeur ? Reconnaissons toutefois que le Say-on-Pay consultatif a avant tout été impactant dans les sociétés non contrôlées. Les comités de rémunération analysent encore insuffisamment : ils n’isolent pas le vote des minoritaires alors que c’est un indicateur intéressant de la perception qu’a le marché de la gouvernance de l’entreprise. C’est aussi un indicateur avancé d’un mécontentement grandissant des actionnaires sur la rémunération qui peut basculer en un vote négatif lorsqu’un actionnaire présent au Conseil d’administration change de camp, comme ce fût le cas chez Renault. Le Say-on-Pay contraignant amplifie largement les conséquences d’un vote négatif. J’anticipe qu’il obligera l’entreprise sanctionnée à retravailler en profondeur ses pratiques et à faire un gros effort de communication pour regagner la confiance des investisseurs. Il y a un risque à ne pas anticiper ce changement. Par ailleurs, le vote contraignant pourrait mettre les entreprises sous surveillance quasi continue dans le cadre d’une évolution dynamique des exigences de gouvernance. Je pense en particulier aux conventions réglementées qui sont approuvées pour plusieurs années. Que faire si le taux d’approbation du SOP contraignant s’effrite au fil de l’eau à cause d’une convention réglementée approuvée antérieurement mais dont les dispositions ne sont plus dans l’air du temps ? Les actionnaires manifestent leur mécontentement sur le peu de documentation qu’ils ont sur l’augmentation des rémunérations fixes des dirigeants cette année. Est-ce un point sur lequel vos clients vous demandent de travailler ? Oui, certaines entreprises se rendent compte qu’un benchmark à lui tout seul n’est pas suffisant pour justifier une augmentation du fixe. Une comparaison de cette augmentation avec les révisions salariales des collaborateurs de l’entreprise est un autre élément à considérer. Etablir le lien avec la performance observée sur plusieurs années deviendra également de plus en plus critique. Le caractère exigeant (ou pas) des conditions de rémunération variable est chaque année remis en cause, mais il semblerait, en ce début d’année 2017, que les actionnaires challengent moins les sociétés sur ce point. Est-ce à votre avis parce que les actionnaires ont changé de terrain de contestation, ou parce que les conditions de variable sont devenues réellement exigeantes ? Il faut plusieurs années de recul pour constater l’évolution réelle dans le temps d’une augmentation des exigences de performance. Cependant, dans le cadre d’un test rétroactif en collaboration avec E&Y des « AGAM », ce nouveau type d’actions de performance qui rémunèrent prioritairement des scenarii de performance boursière compatibles avec un business plan ambitieux mais réaliste, nous avons analysé l’historique du vesting d’actions de performance au sein du SBF 120. Les résultats indiquaient plusieurs cas d’entreprises où le taux d’acquisition conditionné par de critères financiers non boursiers était élevé alors que la performance boursière relative sur la durée du plan était faible. Soit la philosophie des entreprises est que les actions de performance sont prioritairement un outil de fidélisation et que sauf contre-performance notoire elles doivent vester à 100%, soit elles veulent en faire un outil d’incitation de la rémunération de la surperformance. Dans ce cas elles doivent s’interroger sur leur processus de fixation des objectifs de performance. Elles ont intérêt à trancher assez rapidement cette question si comme aux Etats-Unis, le « P4P » basé sur des comparaisons entre rémunération sur plusieurs années et performance boursière devient central.

 

De nombreux investisseurs déplorent que le dialogue sur la rémunération soit uniquement sur le terrain de la forme, et non du fond et du lien avec la stratégie de création de valeur. Qu’en pensez-vous ?

C’est une question centrale. Les comités de rémunération doivent continuer à renforcer leur réflexion amont sur le lien entre les pratiques de rémunération et la stratégie de création de valeur et éviter le piège de se focaliser trop tôt sur les aspects techniques, même si cela est également nécessaire. De la sorte ils feront d’une pierre deux coups : améliorer l’effectivité des pratiques de rémunération et enrichir le dialogue entre l’entreprise et les investisseurs. Quelles sont les « best practices » que vous recommandez ? Votre question tombe à pic. L’IFA vient de publier le vade mecum sur la rémunération des dirigeants auquel nous avons pu contribuer ensemble avec des membres de comités des rémunérations et des experts en gouvernance. Il comprend 30 recommandations concrètes relatives aux pratiques de rémunération et au mode de fonctionnement du comité des rémunérations. Ces recommandations prônent des comités de rémunération proactifs et des pratiques renforçant le lien entre rémunération et performance. Je ne vais pas les détailler ici mais je citerai à titre d’exemple la recommandation de benchmarks pilotés par le comité, le recours à des consultants rapportant directement au comité, une communication sur les rémunérations validée par le comité, la mise en place de processus rigoureux de fixation des objectifs en lien avec l’attente des investisseurs. Propos recueillis par Bénédicte Hautefort .

 

 

 

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